La Révolution à Nevez

Jacques Cambry à Névez

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Vous ne le connaissez pas encore? Surnommé le Breton des Lumières, il fut  Receveur des Etats de Bretagne, puis commissaire des Sciences et des Arts:

Jacques Cambry (1749-1807). Ethnologue et archéologue avant la lettre, plus tard fondateur de l’académie celtique, ce grand voyageur présida le district de Quimperlé sous la Terreur.

Dans son ouvrage « Voyage dans le Finistère » il écrivit en 1794-1795 sur Névez et sur le jeune canton de Pont-Aven; voici quelques extraits savoureux:

« Le territoire de Nevez est plein de monticules, fertile et parfaitement cultivé, il fournit beaucoup de froment, de l’orge et peu de seigle ; cette commune donne sur la mer, elle est cotoyée par la rivière de Pontaven ; de grandes pierres de taille plattes, longues de sept à huit pieds, comme à Trégunc près Concarneau ; comme celles d’ardoises près de la Feuillée, entourent les champs et les courtils, ce qui produit un singulier effet. Point de bois dans Nevez, on prend dans Nizon le bois de chauffage.

Les mœurs de tous les environs sont douces; l’ivrognerie est le seul vice qui y règne, chez les femmes même. On n’a trouvé depuis vingt ans dans Nevez qu’un seul enfant dont le père fut inconnu. Les habitants portent des culottes à la matelotte(1), un grand gilet à capuchon, des soubrevestes (2); presque tous sont mariés; la pêche est abondante sur la côte. Bernard, homme qui sous un extérieur agreste avoit la patience, le zèle et l’amour de l’étude, qu’on rencontre rarement dans ces contrées, s’y dévoroit au métier d’instituteur, servoit de greffier, de municipal(3), faisoit tout dans cette commune : il y mourut assassiné comme le malheureux Gourlaouen à Quérien.

 Ces deux hommes, sollicités par le district(4), après de longs refus cédèrent à la considération du bien public, en annonçant qu’ils seroient poignardés : ils y remplirent tout genre de fonctions, car dans ces communes, l’ignorance de la langue française oblige à résidence quelqu’homme qui connoisse les deux langues,  un commissaire qu’on charge de tout diriger. On peut, on doit les honorer comme des victimes, qui se sont généreusement sacrifiées à leur patrie avec la certitude de périr. Leur famille attend les foibles dédommagemens, et leur mémoire les hommages qui leur sont dûs par la nation reconnoissante.

[…]

Au-delà de Bélon sont les côtes de Nevez ; Raguénez où les Anglois déposèrent l’année dernière deux ou trois mille hommes, pris à Quiberon, qui gagnèrent le Morbihan, plus loin, la rivière de Pontaven.

[…]

Les bâtimens de sept cents tonneaux peuvent, à vide, mouiller à l’embouchure de  la rivière de Pontaven. Cette rade est foraine, mais assez close pour qu’ils y soient en sûreté. Les côtes voisines de la mer sont en ce lieu de soixante à quatre-vingt pieds d’élévation : elles sont défendues par deux forts ; à la pointe de ces batteries, des rochers, à fleur-d’eau, se prolongent à plus d’un demi-quart de lieue dans la mer. Du corps-de-garde de Baguévéchen  on voit les Glénans, l’Isle-Verte, et la côte : près de ce corps-de-garde est une presse de sardine. J’avois oublié d’indiquer la presse de Douélan et la presse de Kéerjégu . Il en existe une autre à la rive opposée, près de Rosbras : la dernière n’est pas en activité, malgré les magasins considérables qui s’y trouvent.


(1) Pantalon à la matelote : large et court, à la façon des matelots.
(2) Vêtement sans manches, qui se mettait par-dessus les autres vêtements.
(3) Substantif désignant un magistrat ou fonctionnaire municipal.
(4) Ancienne division principale d’un département.
admin

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